La Nuit des Dinosaures-Vivants
À la manière des nécromanciens mythologiques capables de réanimer cadavres et squelettes tels de macabres marionnettistes, ou encore d’établir une connexion avec le royaume des morts, les nouvelles technologies nous permettent aujourd’hui de ressusciter et reconstituer des dinosaures. Suivez-nous et découvrez, étape par étape, comment on ramène une créature préhistorique à la vie !
Pour le dialogue avec l’au-delà, c’est le domaine de la paléontologie. L’étude des restes fossilisés et parfois organiques permettant d’en savoir toujours plus sur nos lointains ancêtres, leur composition ainsi que leur mode de vie. Mais pour ce qui est de la restauration des cyclopéennes carcasses, c’est en revanche un travail pour les ingénieurs en scan et impression 3D.
La découverte et l’excavation
Le terme de “dinosaure” est trouvé par le paléontologue anglais Richard Owen en 1842. Avant cela, les restes de ces géants des temps immémoriaux ont toujours été objets de fantasmes et de légendes. Pour les chinois ils ne pouvaient être que des os de dragons et pour les européens des reliques de géants balayés par le Déluge. Ce n’est qu’au XIXème siècle que les géologues, remarquant des similitudes entres les os de ces créatures et les os des lézards, enclenchent une véritable marche en avant.
Néanmoins, avant de pouvoir étudier un dinosaure, encore faut-il le trouver ! Souvent d’ailleurs, c’est “quelqu’un, quelque part, qui tombe sur un truc bizarre”. Ladite personne alerte alors les autorités compétentes et c’est le début de l’aventure : la fouille peut commencer. Toutefois bien sûr, toutes ces découvertes ne sont pas laissées au bon vouloir de la chance, il existe aussi des cartes géologiques sur lesquels les chercheurs peuvent s’appuyer pour déduire des zones sédimentaires ou les régions d’affleurement les plus susceptibles de renfermer les précieux trésors.
Adaptées en fonction du sédiment dans lequel le squelette est enfermé (roche, terre, sable), et généralement soutenues par un outillage de précision, les techniques de dégagement peuvent pourtant s’avérer… musclées. Parfois jusqu’au marteau piqueur quand les os sont pris dans la roche !
Une fois sortis, il faudra alors les catégoriser et les trier. Et pour éviter qu’ils ne se dégradent trop vite ou qu’ils ne subissent les sévices de l’environnement lors des voyages à venir… on leur fait un plâtre !
Le scan du squelette
Scanner les ossements d’une carcasse présente énormément d’avantages. En fait, mis à part le fait que l’on n’a pas l’artefact réel en face de soi, il n’y a même que des avantages. Une fois scannés et numérisés, vous pouvez oublier les soucis liés à la conservation des ossements. Car aussitôt digitalisés, tant qu’électricité il y aura, les modèles 3D ne se détérioreront plus et pourront être réutilisés à l’envie.
En outre, les fossiles excavés sont rarement complets. Il manque régulièrement des os importants dans l’optique d’une reconstitution. Là encore, avoir un modèle 3D adaptable permet par symétrie de compléter les squelettes et d’adapter les ossements, voir de les modifier légèrement pour qu’ils s’intègrent parfaitement à la structure anatomique globale.
Un scan 3D peut capturer un relief ou une structure tridimensionnelle jusque dans les plus infimes détails. Une telle technologie, avec des caméras affichant parfois plusieurs dizaines de mégapixels, peut reproduire un modèle au 1/20e de millimètre. On parle à ce stade d’un tel degré de précision qu’on pourrait rendre les crêtes de nos empreintes digitales !
Ci-dessous, le rendu du scan 3D d’une pièce d’une livre :
Il faut donc scanner un à un les os du fossile, en utilisant les techniques de scan 3D par laser, par lumière structurée (on projette des franges lumineuses sur la cible et le logiciel traite le comportement des franges pour en déduire un relief) ou par photogrammétrie (des photos de la cible sont prises sous tous les angles avec différentes lumières pour reconstituer un modèle 3D photoréaliste).
Chaque scan est donc converti en un fichier de maillage 3D. Ne reste plus, si l’on peut dire, qu’à leur donner chair.
L’impression et l’assemblage
Une fois les modèles numériques à disposition : “tout devient possible” (pour ne pas paraphraser un célèbre slogan… ;) ). On peut mouler des métaux (fer, cuivre ou même bronze), imprimer du thermoplastique ou de la poudre de gypse en couches successives, ou encore usiner un bloc de matière à l’aide d’un bloc d’usinage.
Dans le cas d’os géants de dinosaures, la méthode utilisée est généralement la suivante :
- création de la réplique des os en usinant des blocs de polystyrène extrudé (styrofoam)
- production des moules en résine à partir de ces répliques
- coulée de fibre de verre dans les moules pour obtenir le fac-similé de nos os originels
- assemblage du squelette sur sa structure métallique
- peinture manuelle de chaque partie du fossile
Découvrez dans la vidéo ci-dessous le processus de création d’une réplique grandeur nature du titanosaure (40 mètres de long pour 70 tonnes de son vivant) au American Museum of Natural History .
Certains poussent même le souci de résurrection jusqu’à reconstituer des dinosaures tels que ce à quoi ils devaient ressembler lorsqu’ils foulaient notre planète voilà des millions d’années. En déduisant la couleur de la peau à partir de mélanosomes présents avec le fossile, il est dans certains cas possible de répliquer à l’identique la peau du dinosaure pour la lui appliquer. C’est exactement ce qui s’est passé lors de la reconstitution de ce psittacosaure : l’équipe de spécialistes ayant étudié le fossile, dirigée par Jakob Vinther, a ainsi travaillé avec le paléoartiste Robert Nicholls afin d’obtenir la réplique ultraréaliste que vous pouvez observer ci-dessous.
Grâce aux ossements et aux restes organiques présents, cette restitution de psittacosaurus compte parmi les plus précises jamais produites, au plus proche de son apparence originale.
Et voilà ! Maintenant vous savez tout sur la nécromancie de dinosaures ! Maintenant l’autre question pivot de toute cette discussion : quand partez-vous enfin en expédition, à la chasse aux fossiles de dinosaures ?